Dans les conditions habituelles de vie, l’accessibilité aux soins de santé pour les personnes vulnérables, y compris les personnes handicapées, doit être affirmée à tout prix : chacune et chacun a le droit à cette accessibilité de manière non discriminatoire dans une perspective d’universalité.

Choix éthique et discrimination

Dans le cadre de la crise que nous vivons actuellement, la problématique est ravivée de manière criante. Si nous venions à manquer d’outils de « santé pour tous », de places en institutions hospitalières, de respirateurs, de soins intensifs, des choix devront-ils être posés ? Et comment ? Les utilitaristes évoquent comme critères de choix le plus grand nombre possible de guérisons, l’efficience optimale, la probabilité supérieure de réussite. Dans de telles options, les personnes les plus vulnérables, et notamment en situation de handicap, risquent de faire l’objet de discriminations et la problématique de l’accessibilité aux soins est au cœur de cette réflexion. Or une alternative éthique n’implique-t-elle pas que toute vie doit faire l’objet de respect inaliénable, quelles que soient les conditions d’intervention sanitaire ?

Si des choix doivent être opérés, doivent-ils l’être par des décideurs politiques, par des représentations citoyennes, par des comités d’éthiques, par des médecins en conformité avec leur déontologie professionnelle ? Aucune de ces positions ne semble défendable de manière absolue.

Revoir le système de santé

N’est-ce pas le système de santé dans sa globalité qui doit être réévalué quant à son efficacité à répondre aux besoins de chacune et de chacun, de toutes et de tous, sans discrimination et quelles que soient les situations ? Si, dans la crise actuelle, le confinement est une discrimination positive en faveur des plus vulnérables, la discrimination négative qui consiste à exclure de l’accessibilité aux soins de santé ces mêmes personnes ne pose-t-elle pas question ? Dans une prospective à long terme, l’accessibilité généralisée aux soins de santé, y compris pour toutes les personnes en situation de handicap, ne doit-elle pas être envisagée de manière radicale par notre société ?

Accessibilité aux soins de santé pour tous

Dans ce contexte de crise, différentes associations ont collaboré pour relayer, de manière accessible à tous, les informations concernant le Covid-19 et le confinement. Avant même la crise, les associations Altéo, Inclusion asbl et Handicap & Santé ont mené des campagnes de réflexion et d’information pour et avec les personnes en situation de handicap, concernant leur accessibilité aux soins de santé dans une perspective d’universalité. Au niveau fédéral, la Commission d’accompagnement d’Unia, concernant la mise en œuvre de la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées est sensible à cette problématique. Unia a déjà pris des positions dans ce sens, tout comme le Conseil Supérieur National des personnes handicapées, au cœur de la crise actuelle.

Dans l’ouvrage Ethique & Handicap publié récemment aux Presses Universitaires de Namur, nous insistons sur le fait que les questions de non-discrimination à l’égard des personnes handicapées doivent être prises en compte par les commissions d’éthique et les pouvoirs politiques, ainsi que par les citoyennes et les citoyens dans leur ensemble. Quels que soient les décideurs, il s’agit de lutter contre les discriminations à l’égard des plus vulnérables en matière d’accessibilité aux soins de santé.

 

Michel Mercier

Professeur émérite Université de Namur
Professeur associé, UCLille
Partager sur :